Marcel Melthérorong : « La résidence m’a permis d’approfondir mes connaissances »
L’auteur a séjourné un mois à Haapiti et un mois à Papara dans le cadre de la résidence d’écriture océanienne. Il a profité de ce temps pour observer et rencontrer les résidents et scolaires de son voisinage. Maintenant, il raconte. Il annonce la sortie de deux ouvrages.
Chanteur-compositeur-interprète et écrivain vanuatais, Marcel Melthérorong avoue n’avoir pas su quelle île choisir pour la résidence d’écriture d’océanienne. « Il y en a tant en Polynésie, je n’en connaissais aucune. » Il a finalement opté, suivant des conseils glanés dans son entourage, pour Haapiti à Moorea (10 septembre au 10 octobre) et Papara à Tahiti (10 au 19 octobre et 2 au 12 novembre).
Il a passé un mois sur chaque site. « L’ensemble de ses rencontres m’ont permis de remettre un peu mes connaissances à jour ». Par connaissances, il entend les ressemblances et différences entre les Polynésiens et les Mélanésiens. « Ce grand peuple qui habite l’Océanie. » Il a pu se familiariser avec les aliments, la cuisine, la langue. « Autant d’aspect que je connaissais, un peu, mais que j’ai pu découvrir plus profondément. »
Marcel Melthérorong s’est aussi intéressé aux traditions et à leur pratique. À Tahiti, beaucoup de traditions « reviennent sur la table ». Même si la pratique ancestrale s’est perdue, « on essaie à Tahiti comme ailleurs, en Polynésie, en Nouvelle-Calédonie, etc. de les raviver pour ne pas les perdre définitivement ».
Un décalage évident
Il a pu, par ailleurs, constater un décalage entre les îles, et notamment, entre celles du Vanuatu où il vit et celles de Polynésie. Selon lui, il y a d’un côté « ceux qui savent le monde moderne », et « ceux qui le découvrent ». Chez lui, c’est « une phase de découverte tandis que dans d’autres endroits existe une autre dynamique, une autre façon de voir aujourd’hui et demain ». À Tahiti « les gens sont à fond dedans, nous nous mettons tout juste un pied dedans ». Or, une fois immergé dans le monde moderne, une prise de recul se met en place. « On analyse, on essaie de comprendre pour mieux le contrer. Dans le cas contraire, on dit oui à tout pour ne pas être les derniers à savoir. » Dans ce contexte la parole continue à circuler, le passé est toujours véhiculé, de même que la tradition, mais elle emprunte d’autres chemins, celle des téléphones, des tablettes et ordinateurs. Tout, ou presque et en tous les cas de plus en plus, passe par les réseaux.
« Ça, c’est incroyablement fort ! »
Au cours de la résidence, Marcel Melthérorong a fait de nombreuses rencontres, il a pu s’entretenir avec le voisinage, mais aussi avec des scolaires. « Il y a cette dimension du conte, de la parole que l’on partage, qu’elle soit fictionnelle ou bien réelle. » À Tahiti, ce partage use de moyens modernes, pour autant, « les enfants sont partout pareils, ils sont l’innocence à l’état pur ». Ils peuvent et veulent remercier en retour. « Ils le font en Polynésie, d’une manière que je n’avais encore jamais vue ailleurs, y compris chez moi. » Ils n’hésitent pas à enlacer, embrasser. « Et quand ils sont une centaine tout autour de toi à faire, ça, c’est incroyablement fort ! »
Les rencontres scolaires ont eu lieu à la fois en primaire et en secondaire. Marcel Melthérorong a pu s’entretenir avec des enfants de différents âges et des adolescents. « J’ai vu donc ce que les enfants étaient en passe de devenir. » L’auteur a considéré ce qu’ils voyaient, ce qu’ils vivaient et géraient et ce vers quoi tout cela les menait. Il sait qu’il aurait pu aller plus loin dans son analyse en vivant au sein d’une famille. Mais cela lui a suffi pour rentrer avec une nouvelle vision, une nouvelle façon de voir « nos enfants des îles ».
Marcel Melthérorong sort nourri de ces deux mois, de toutes ces comparaisons. Il a commencé l’écriture sur place. « Je poursuis encore aujourd’hui. » Il dit avoir déjà contacté un éditeur. Il annonce la sortie d’un livre pour adulte, un roman « qui tombe un peu dans la science-fiction » ainsi qu’un livre pour enfant. « J’ai été inspiré en particulier par la mer. Elle est notre chemin, notre protection, mais elle aussi celle qui nous domine, nous sépare. Elle est notre prison. » Il dit en écrivant « tout ce que l’on vit en tant que peuple de l’océan. »
Il sort, de cette résidence, grandi. Marcel Melthérorong, d’origine vanuataise, est né à Nouméa en Nouvelle-Calédonie. Il rappelle qu’il a grandi au cœur d’une communauté mixte, avec des Kanaks, des Vietnamiens, des Vanuatais…avant de s’installer pour de bon à Port-Vila en 1994. Il se réjouit désormais de mieux connaître, en plus la Polynésie et les Polynésiens.
À Port-Vila Marcel Melthérorong est l’un des acteurs les plus dynamiques de la vie culturelle ; il participe régulièrement à l’organisation de grandes manifestations musicales de la capitale dont Fest’Napuan, la Fête de la Musique et FrancoSonik. Il est lui-même musicien et a créé deux groupes très remarqués : XX Squad et Kalja Riddim Klan. Nul doute que la résidence d’écriture résonnera donc au-delà des mots.